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Etés anglais, Elizabeth Jane Howard.


C’est complètement par hasard que je suis tombée sur Etés anglais d’Elizabeth Jane Howard.


Comme tous les ans, je suis passée à la bibliothèque afin de glaner, avant les vacances d’été quelques romans pour la belle saison. Le livre était placé sur le tourniquet des nouveautés, mon œil a immédiatement été attiré par sa couverture très graphique aux reflets verts et bruns.

Et comme il m’arrive souvent, lorsque je ne veux me fier qu’à mon instinct et ne rien voir défloré avant d’entamer le roman, je n’en ai même pas lu le résumé, me contentant des quelques critiques dithyrambiques imprimées sur la quatrième de couverture.

On y parlait d’une « éblouissante reconstruction historique », d’un roman captivant, « chic et soigné » et d’une écrivaine « intelligente et perspicace, faisant preuve d’un immense talent d’observation ». Inutile de préciser qu’il ne m’en fallait pas plus : j’avais sous la main le premier tome d’une saga historique devenue culte en Angleterre. De quoi me ravir le temps de quelques 600 pages.

Si j’ai eu quelques craintes au début de ma lecture au sujet du rythme du roman - car entrecoupé par des très nombreuses descriptions (aussi impeccables qu’admirables soit dit en passant) - ces peurs ont très vite été dissipées par la dextérité d’Elizabeth Jane Howard à lui donner corps.

Le premier volume de la série de cinq constituant La Saga des Cazalet parue en 1990 et traduite en français très récemment, est une merveille de style et de précision capable de nous camper dans un décor et une époque avec une maestria indéniable.

Tous les ingrédients y sont pour séduire les amateurs de Jane Austen ou des soeurs Brontë : Elizabeth Jane Howard y peint avec adresse une magnifique galerie de personnages réunis pendant les étés 1937 et 1938 dans leur domaine familial du Sussex. Soit trois générations de Cazalet, leurs « pièces rapportées » et leurs trente-cinq domestiques, incarnant une caste bourgeoise aussi sympathique que bardée de principes. Les femmes, cantonnées aux tâches domestiques, à l’éducation des enfants et à la gestion des serviteurs, courent les boutiques et raccommodent les vêtements, tandis que les hommes entretiennent des maitresses, jouent au squash et parlent affaires en sirotant un whisky dans le salon. Les domestiques eux, restent à l’écart de tout ces élégants que le hasard de la naissance a gâtés.

Et s’il y a bien une chose plaisante avec les sagas, c’est que l’on y prend le temps ! De découvrir puis de vivre avec leurs personnages, de s’emmitoufler dans leurs paradoxes, de rire de leurs fantaisies et de s’inquiéter de leur évolution. Certains sont conventionnels, d’autres fantasques, certains affectueux d’autres bardés de préjugés et assurés de leurs bons droits.

Et puis il y a les enfants ! On se retrouve embarqué dans leurs jeux, leurs bisbilles naïves et leurs si justes questionnements ! Inventifs et réjouissants, ils nous emportent dans un monde fait de rires et de peurs, un monde que les adultes ne perçoivent pas toujours, trop occupés qu’ils sont à s’inquiéter de tout et de rien.

Car la menace de la guerre est bien présente. On en parle à demi-mot, et surtout pas devant les enfants…à peine avec les femmes. Car personne ne souhaite revivre les horreurs de la précédente qui laissa Hugh estropié et ravagé.

Chaque parcelle de leur vie, des repas aux vêtements, en passant par les activités, les discussions et les jeux, est détaillée avec une précision redoutable.

Quel plaisir que de se retrouver plongé dans la chambre de Louise au début du roman, regorgeant de babioles qui feront d’elle une grande comédienne, pense-t-elle !

Quelle joie de suivre Christopher et Simon dans leur tente au fond de la propriété remplie d’objets destinés à leur survie durant leur hypothétique fugue,

de boire le thé en compagnie de Viola et de Sybil,

de goûter aux plaisirs d'une journée à la plage en compagnie de toute cette marmaille !

Et quel délice que d’être emporté dans les cuisines de Home Place, pleines de bruits et de fracas !

De quoi être transporté à la fin des années 30 avec une rapidité déconcertante.

Car nous avons bien un document historique remarquable en la présence de ce roman ! Rien n’y est laissé au hasard, chaque trait s’en retrouve esquissé avec minutie et tendresse.

Résultat, on a le sentiment de se coucher moins bête ! Et d’en avoir appris beaucoup des rituels, des pensées et des mentalités de ce petit monde bourgeois d’avant-guerre. On a vécu, quelques 600 pages durant, en compagnie de ces êtres, qui semblent si éloignés de nous, et qui d’une façon ou d’une autre ont fait un peu de notre Histoire.

C’est instructif et tendre tout à la fois, passionnant et grandiose ! A dévorer cet été!


Les Aventures des Cazalet se poursuivent dans le Tome II de la saga, A rude épreuve, à paraître en octobre 2020.

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