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Alors voilà, Baptiste Beaulieu.


Il m’arrive parfois de pleurer en terminant un livre.

Je sens ma gorge se serrer en voyant les dernières pages approcher, et j’ai l’intime conviction, comme une cheville arrimée au corps, qu’une fois de plus, je n’y échapperai pas.


La première fois – les premières larmes chaudes et intarissables déversées sur les pages d’un roman, c’était sur celles de Soldat Peaceful de Michael Morpurgo –, j’avais dix ans.

Dix-neuf ans plus tard, c’est Alors voilà de Baptiste Beaulieu qui a eu raison de mes nerfs, de mon cœur et de ma sensibilité.


Ce n’était pas une surprise tant j’admire les chroniques régulières de son auteur sur France Inter. J’aime entendre sa voix se briser en racontant le métier de soignant, sentir l’émotion dégagée des ses trémolos sublimes et goûter l’immensité de la Vie dont témoignent ses mots pleins de grâce et de bonté.

À chaque fois (ou presque) qu’ils me titillent les tympans – hasard ou volonté des dieux –, je suis dans ma voiture, toute disposée à l’Ecoute. Comme si le destin voulait absolument que je sois pleinement concentrée sur ce qui m’était donné à entendre.

Aussi, lorsqu’après des années à me dire qu’il fallait franchement que je jette un oeil à Alors voilà – son premier livre entre temps devenu best-seller –, je suis tombée sur l’intervention de Baptiste Beaulieu dans l’excellent podcast La Source animée par Cécile Coulon. Je n’avais définitivement plus la possibilité de procrastiner. J’avais été, une fois de plus, terriblement émue par les mots de ce jeune médecin et romancier ; il ne me restait plus qu’à emprunter le livre qui patientait alors sagement dans les rayonnages de la bibliothèque dans laquelle je travaille.

*


Des Urgences du rez-de-chaussée aux soins palliatifs du cinquième étage, voilà la vie d’un jeune interne qui déteste commencer sa journée par une tentative du suicide.

Une patiente en stade terminal s’impatiente: son fils est bloqué à Reykjavik à cause d’un volcan en éruption. Pour lui laisser le temps d’arriver, l’apprenti médecin se fait conteur.

Se nourrissant de situations bien réelles, Baptiste Beaulieu passe l’hôpital au scanner. Il peint avec légèreté et humour les chefs autoritaires, les infirmiers au grand cœur, les internes gaffeurs, les consultations qui s’enchaînent, les incroyables rencontres avec les patients.

Par ses histoires d’une sensibilité folle, touchantes et drôles, il restitue le petit théâtre de la comédie humaine.


*


Si Sandrine Blanchard (Le Monde) ajoute qu’Alors voilà est « une pépite d’humanité; une façon de raconter, comme nulle autre pareille, l’incroyable quotidien de l’hôpital. », c’est à mon sens, d’abord et avant tout, la Beauté avec un grand B que Baptiste Beaulieu met en scène entre ses lignes.

Et je crois que rien ne pourrait mieux en témoigner que le bas de la page 210 :

« Hier, elle m’a remplacé aux Urgences. Quand je lui ai demandé comment s’était passée sa journée en bas, elle m’a répondu:

- Rien de particulier.

C’est faux: il suffit de regarder les choses simples derrières les choses compliquées et de s’émerveiller des choses compliquées derrière les choses simples. Blanche se protège de cet émerveillement. La beauté en l’homme, que ce soit Mme Goldgrass en train d’expirer ou Mme Galactus qui se transforme en menhir, cette beauté en l’homme effraie Blanche. Blanche tait ces belles rencontres. Qui dit rencontre dit séparation. Elle se protège et cela lui coûte. Mettre son esprit et son cœur au silence est une gymnastique, cela ne va pas de soi. »

Et s’il y a bien une personne qui ne met ni son esprit ni son cœur au silence, dans la vie comme dans son Art, c’est bien Baptiste Beaulieu. Chacun de ses mots respire l’Humanité, la compassion, l’intelligence et la Beauté. Dans les veines de cet homme, coule une sève unique. Dans son génome, un allèle des plus rares. Voilà un Être capable de voir la Beauté partout et mieux encore: capable de la donner à voir.


Par ses mots, Baptiste Beaulieu éclaire, nourrit, et fait grandir. Il regarde, comprend, doute et note.

Il en fait un livre pétri de douceur, d’humour et de noblesse. Un livre que nous devrions tous lire, au moins une fois, ne serait-ce que pour regarder la vie et les autres autrement, rien qu’un instant.


« Chef Pocahontas n’y a vu ni punition divine, ni rédemption, mais cette réconciliation que les Hommes connaissent depuis la nuit des temps et appellent une « évidence ».

Elle se remémore parfois le petit garçon de quatre ans, avec apaisement, sans reproche.

Elle a sa fille, son évidence.

La plus ancienne de toutes.

Celle de la mère et de l’enfant. »

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