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  • Photo du rédacteurloudebergh

L'eau du lac n'est jamais douce, Giulia Caminito.


Depuis que l’on m’a offert ce livre, j’ai le sentiment de le voir partout :

dans les coups de cœur des blogueurs,

en haut de la piles des nouveautés à ne surtout pas manquer en librairie,

et sur les photos qui animent mon fil d’actualité instagram.


Ce n’est pourtant pas le coup d’essai de Giulia Caminito - son livre précédent, Un jour viendra (Prix Mare Nostrum 2021) a rencontré un très vif succès et tous ses romans sont aujourd’hui traduits dans plus de vingt pays – mais il faut croire que L’eau du lac n’est jamais douce a su toucher plus fort,

Émouvoir, transcender.


« Où tu l’as trouvé ? me demande-t-elle en posant sa tête sur l’ours.

Je l’ai gagné au stand de tir, j’avoue, assise sur mon lit, et je cherche des yeux ce que je pourrais jeter, ce qui a l’air inadapté ou criard.

Ça te ressemble bien.

Quoi ?

De tirer et de gagner.

Pourquoi ?

Parce que tu es comme ça, tu as le courage de tout faire.

Je ne sais pas quoi répondre à cela, je ne me suis jamais considérée comme capable ou volontaire, j’ai toujours agi sur des impulsions, par convulsions, par revanche et par honte. »


*


« Notre mère ressemble à une héroïne de bande dessinée, à Anna Magnani au cinéma, elle braille, ne capitule jamais, cloue le bec à tout le monde. »

Antonia, femme fière et têtue, s’occupe d’un mari handicapé et de quatre enfants. Pauvre et honnête, elle ne fait pas de compromis et croit au bien commun. Elle inculque à sa fille Gaia le seul principe qui vaille : ne compter que sur ses propres capacités. Et Gaia apprend à ne pas se plaindre, à lire des livres, à se défendre, toujours hors de propos, hors de la mode, hors du temps. Mais sa violence, tapie tel un serpent, ne cesse de grandir.

Nous sommes dans les années 2000, les grandes batailles politiques et civiques n’existent plus, seul compte le combat pour affirmer sa place dans le monde.


*


Giulia Caminito est une styliste incroyable. Son écriture est brûlante, sans concession, au scalpel. Elle n’est que vérité nue et terrible.

Sale, inquiétante, glorieuse.


La première scène est magistrale (cette écriture !), elle donne le ton, nous empoigne et nous force à regarder. Ce que l’on ne veut pas toujours voir.

La note de l’autrice, en fin d’ouvrage donne, elle, la note finale. Elle m’a touchée au cœur, émue aux larmes. Parce ce que c’était bien ce que j’avais pressenti tout au long du récit, rien n’était fortuit, de l’autofiction pure !

De la fange, de la douleur et beaucoup de colère.

Et des personnages ! Comme seule la très grande littérature sait les porter. Humains, foutraques, perdus, désirant.


C’est une histoire de femmes et d’hommes qui errent, galèrent, se battent sans cesse. Pour exister, avoir un pré carré, Être, tout simplement. Des gens que la marche du monde se plait à laisser de côté, abattus et emplis de hargne.


Un seul petit bémol à cette dithyrambique note :

j’ai parfois trouvé au récit (notamment au milieu) des longueurs, des errances, quelques ennuis. Je pense qu’il aurait été possible de couper quelques fois, pour soutenir le rythme et renforcer la puissance de la langue.


« Je devrais lui dire que c’est lui qui a tué Carlotta, lui et les garçons comme lui, ceux qui ont lavé leur conscience en se rendant à son enterrement, mais qui avaient honte quand elle leur proposait d’aller prendre une glace ensemble, ceux des cagibis, des recoins et des coulisses, ceux des touche-moi mais reste derrière moi, je ne veux pas voir ton visage. »


Il n’empêche que L’eau du lac n’est jamais douce est un roman nécessaire.

C'est le grand roman d’une grande autrice, aux mots de verre et de métal.





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