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Photo du rédacteurloudebergh

Quelle n'est pas ma joie, Jens Christian Grondahl.


J’aime les livres emprunts d’une tendre mélancolie.

Que l’on déguste comme des madeleines trempées dans un nuage de thé noir fumant.

Ceux qui contiennent en leur sein toute la tristesse du monde,

Et toute la joie aussi.


Les livres qui disent tout et rien, avec la candeur de l’enfant,

Et la dignité du sage.

J’aime les livres dans lesquels on peut lire :

« Elle était accrochée dans leur chambre afin qu’ils puissent voir combien leur père et leur mère s’étaient aimés. C’est la seule chose qui compte pour un enfant. Nous pardonnons à nos parents qu’ils nous oublient, à condition qu’ils s’aiment. »

Les livres dans lesquels il ne se passe pas grande chose,

Mais dont la lecture est aussi immense que l’océan,

Aussi vertigineuse qu’une forêt primaire,

Aussi infinie qu’un horizon bleuté.

 

Ellinor a soixante-dix ans. Elle vient de perdre Georg, son mari, et elle a rapidement décidé de vendre leur maison, dans la banlieue chic de Copenhague, afin de retourner vivre à Vesterbro, le quartier populaire de son enfance. Et Ellinor va se raconter. Elle s’adresse à Anna, sa meilleure amie, qui était la première femme de Georg. Et la maîtresse de Henning, son mari à elle. Anna et Henning ont été emportés par une avalanche dans les Dolomites, pendant les vacances que les deux couples passaient ensemble, au cours des années soixante.

 

J’aime les livres dont rien ne coupe la langue,

Le souffle, l’incandescence.

Ni les chapitres,

Ni les paragraphes,

Pas plus que la fin, qui ne termine rien et commence tout.

Ceux qui s’écoulent avec la puissance du torrent et la langueur du ruisseau.

Qui serpentent dans les méandres des cœurs et la complexité des âmes.

Ceux qui évoquent la beauté des émotions que l’humanité toute entière a en partage,

Sans avoir jamais trouvé les mots pour leur donner corps.

« J’ai conservé le même drap, la même housse de couette jusqu’à ce que je ne sente plus son odeur. J’aurais bien aimé pouvoir en parler avec toi, de l’odeur de Georg. Comment peut-on connaître quelque chose aussi bien sans avoir les mots pour le décrire ? Son odeur est là, dans mon souvenir, comme un fait, et elle y reste, sans pouvoir être décrite. Elle existait, elle n’est plus qu’un souvenir muet. »

J’aime les livres qui agissent comme des apostrophes, ouvrant les mots, les phrases et les esprits.

Les exercices de deuil, de mémoire et de réflexion.

Ceux qui utilisent le « tu » et semblent s’adresser à nous.

Rien qu’à nous.

J’aime les livres qui ont l’immédiateté d’un impact de bombe,

Et l’indolence d’un chantier de longue haleine.

Ceux qui parlent d’amour comme s'ils en avaient saisi le dixième de l’étendue,

Et en disent des merveilles :

« Ce sont les abandonnés de l’amour qui doivent essayer de comprendre. Ce sont les délaissés qui doivent se montrer nobles et intelligents pour saisir que l’autre, on ne l’a qu’en prêt. Les amants prennent le droit, avec violence ou avec ce qui y ressemble, et ils ne songent pas à s’expliquer. »

J’aime les livres qui parlent d’oubli, de rancœur, et de jalousie,

De pardon, d’amour infini et de compréhension ultime.

J’aime les livres qui disent la vie dans ce qu’elle a de plus lumineux et de plus sombre. Les livres comme Quelle n’est pas ma joie, de Jens Christian Grondahl.

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