Atuk, Michel Jean.
- loudebergh
- 12 août
- 2 min de lecture

Rien de ce qui vit ne dure. Sauf l’amour.
Atuk. Voilà un roman splendide qui ne recherche ni l’effet, ni la complexité. Solide, tranquille, assuré sans être certain, il a la force de son ton, de la vérité qu’il met en avant, et l’intelligence de son regard.
C’est un livre pour lequel il m’a fallu quelques pages (une bonne centaine) avant d’en saisir la réelle splendeur. Je ne voyais au début qu’un beau récit, somme toute très classique : une alternance des points de vue joliment construite mais sans grande invention.
Et puis j’ai passé la moitié et mon cœur s’est emballé.
Je n’ai plus pu le lâcher.
Le récit continuait – haletant, sensible et intelligent – mais à celui-ci s’ajoutait la grandeur d’une pensée (qui n’avait rien d’une thèse).
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Jeannette a grandi entre les lacs et les forêts de son territoire ancestral, le Nitassinan. Mais lorsqu’elle épouse un blanc, elle est exclue de sa communauté et forcée de quitter les siens pour s’installer en ville, loin de tout ce qu’elle connaît. Des années plus tard, Michel, son petit-fils journaliste à Montréal, vient se recueillir sur sa tombe et s’interroge sur ce choix qui le fait vivre lui aussi entre deux culture. Car l’indien, lui dit-on, il l’a en lui…
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Atuk, c’est d’abord l’histoire d’une des communautés innue de Mashteuiatsh, une communauté de chasseurs trappeurs nomades établie sur la rive ouest du Lac Saint-Jean (Pekuakami). Michel Jean nous entraine à la leur suite, dans leurs migration hivernales vers les hautes terres riches en grands gibiers. Nous voilà traversant avec eux les hivers prolifiques comme les plus durs, les printemps où tout explose, les descente des fleuves et des rivières, dans un territoire vierge et grandiose.
Mais cela, c’était Avant. Avant la venue les blancs. De leurs barrages, de leurs champs coupés de frontières. Avant que le mot prairie perde non sens.
Avant que le mode de vie de ces communautés ne s’effondre.
Mais pas de gentils indiens ni de méchants blancs sous la plume de Michel Jean : la vie, telle qu’elle est et était, donnée à lire dans les mots de sa grand-mère. Une vie rythmée par les besoin de la forêt, du soleil et des saisons. Une vie dans laquelle le temps est tout et l’ennui inexistant. Dans laquelle chacun a sa place, son rôle et son travail : femme comme homme, enfant, vieille, vieux.
Car Atuk, c’est une compréhension réelle de ce que les innus ont perdu avec la fin des prairie, la fin de leur mode de vie.
Mais outre l’histoire d’une communauté, Michel Jean nous livre ici une formidable histoire d’amour. D’un territoire d’abord, c’est vrai, mais surtout celle d’une femme (Shashuan Pileshish – Jeannette) pour son mari, un colon à moitié autochtone qu’elle a aimé jusqu’a son dernier souffle. Les derniers paragraphes de son récit m’ont foudroyée tant je les ai trouvé beaux. Ils disaient l’amour le vrai, sans fioriture, sans effet. Avec grâce, désir et bonheur, tout simplement.
Alors courez-y ! Il y a, entre les mots de Michel Jean beaucoup à apprendre. Et plus encore à vivre…
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