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Dernier inventaire avant liquidation, Frédéric Beigbeder.


"Depuis 5 ans que je suis critique littéraire (à Elle, Voici, Lire, au Figaro Littéraire, au « Masque et la Plume » ou sur « Paris Première »), je tente, avec mes maigres moyens – subjectivité d’autodidacte et enthousiasme naïf -, de désacraliser la littérature. Pour moi, rien n’est plus criminel que de la présenter sous un jour solennel (c’est à dire poussiéreux), car le livre est, aujourd’hui plus que jamais, en danger de mort."


Voilà comment Frédéric Beigbeder entame son Dernier inventaire avant liquidation.

Une manière d’envoyer un coup de pied dans la fourmilière un brin vieillotte qu’est devenue Dame Littérature les années passant.

Délicieux, non ?


Tout est parti, raconte-t-il, d’une volonté du Monde et de la FNAC d’élire « les 50 livres du siècle ». Entendez : les 50 livres qui ont fait le XXème.

Durant l’été 1999, il a été demandé à 6000 français d’établir une liste:


1. L’Etranger d’Albert Camus.

2. À la recherche du temps perdu Marcel Proust.

3. Le Procès de Franz Kafka.

4. Le Petit Prince d’Antoine de Saint Exupéry.

5. La condition humaine d’André Malraux.

6. Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline.

7. Les raisins de la colère de John Steinbeck.

8. Pour qui sonne le glas d’Ernest Hemingway.

9. Le Grand Meaulnes d’Alain Fournier.

10.L’écume des jours de Boris Vian.

11.Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir.

12.En attendant Godot de Samuel Beckett.

13.L’Être et le Néant de Jean-Paul Sartre.

14.Le Nom de la rose d’Umberto Eco.

15.L’Archipel du Goulag d’Alexandre Soljenitsyne.

16.Paroles de Jacques Prévert.

17.Alcools de Guillaume Apollinaire.

18.Le Lotus bleu d’Hergé.

19.Journal d’Anne Franck.

20.Tristes Tropiques de Claude Lévi-Strauss.

21. Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley.

22.1984 de Georges Orwell.

23.Astérix le Gaulois de Goscinny et Uderzo.

24.La Cantatrice chauve d’Eugène Ionesco.

25.Trois Essais sur la théorie sexuelle de Sigmund Freud.

26.L’œuvre au noir de Marguerite Yourcenar.

27.Lolita de Vladimir Nabokov.

28.Ulysse de James Joyce.

29.Le Désert des Tartares de Dino Buzzati.

30.Les Faux-Monnayeurs d’André Gide.

31.Le Hussard sur le toit de Jean Giono.

32.Belle du Seigneur d’Albert Cohen.

33.Cent Ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez.

34.Le bruit et la Fureur de William Faulkner.

35.Thérèse Desqueyroux de François Mauriac.

36.Zazie dans le métro de Raymond Queneau.

37.La Confusion des sentiments de Stefan Zweig.

38.Autant en emporte le vent de Margaret Mitchell.

39.L’Amant de Lady Chatterley de D.H. Lawrence.

40.La Montagne magique de Thomas Mann.

41.Bonjour Tristesse de Françoise Sagan.

42.Le Silence de la mer de Vercors.

43.La Vie mode d’emploi de Georges Perec.

44.Le Chien des Baskerville d’Arthur Conan Doyle.

45.Sous le soleil de Satan de Georges Bernanos.

46.Gatsby le magnifique de Francis Scott Fitzgerald.

47.La Plaisanterie de Milan Kundera.

48.Le Mépris d’Alberto Moravia.

49.Le Meurtre de Roger Ackroyd d’Agatha Christie.

50.Nadja d’André Berton.


Bien que Beigbeder avoue ne pas être pleinement satisfait de cette liste – nombre d’auteurs qu’il juge essentiels ont, à son sens été oubliés -, c’est elle qu’il choisit comme substrat pour dépoussiérer nos Classiques, desserrer le nœud de leur cravate et ôter leurs escarpins étriqués.

Parce qu’il est plus que nécessaire, pense-t-il, de surmonter la timidité que nous imposent les grandes œuvres d’art et de faire mentir la célèbre phrase d’Hemingway : « Un chef d’œuvre est un livre dont tout le monde parle et que personne ne lit. »


Un titre après l’autre, sur trois pages maximum, c’est au couteau et la fourchette que l’auteur s’attaque aux monstres des Lettres que, toujours, l'on cite d’un air entendu. Et je dois dire que le pari est réussi ! Avec toute l’irrévérence, l’ironie et l’humour (« politesse du désespoir ») qu’on lui connaît (doublé d’un talent d’écrivain indéniable), Beigbeder parvient à nous donner envie – le mot est faible – de nous plonger dans ces romans qui, longtemps, nous ont fait peur

et de relire ceux que l’on a lus un jour, parfois « mal lus » car étudiés à l’école, de force, "sans nonchalance ni désir spontané".


C’est souvent tendre et bienveillant, parfois cynique, parfois méchant, mais terriblement savoureux.

Sous sa plume, l’immense Belle du Seigneur d’Albert Cohen devient une pâtisserie appétissante, et Le Voyage au bout de la nuit de Céline l’œuvre sans laquelle on n’imagine plus vivre, ne serait-ce que quelques heures supplémentaires.


Et il faut avouer que notre esprit s’amuse et s’agite en lisant page 53 : « Evidemment, on pourrait penser que Le Silence de la mer a aujourd’hui davantage une valeur historique et sentimentale que littéraire : il n’en est rien alors il ne faut pas penser n’importe quoi. »

La voix de Beigbeder résonne dans notre tête - celle-là même que l’on adore détester, mais quelle joie !


Alors dépêchez-vous de vous procurer ce petit manuel de survie.

Il y a des chances que vous ne voyiez plus les choses de la même façon par la suite.

Et il se pourrait même que vous vous réveilliez un matin avec l’effroyable désir de vous procurer Ulysse de James Joyce, ou de jeter un œil nouveau à La Confusion des sentiments de Stefan Zweig.

Tentant, non ?

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