Lorsque Philip Roth recommande un roman,
on a tout intérêt à y jeter un oeil.
Voire deux.
Et ce, d’autant plus qu’il écrit au sujet dudit livre que « la précision tranquille et l’assurance avec lesquelles Maile Meloy y décrit comment s’est détraquée la vie ordinaire des Américains est un exploit qui ne peut qu’impressionner, et pas seulement sur le plan littéraire. »
Autant dire que ce serait faire affront à l'auteur de la fantastique Pastorale Américaine (1997), que de ne pas sauter à pieds joints dans Pieux mensonges, roman ayant connu un succès foudroyant en Angleterre et aux Etats-Unis.
C’est une histoire de famille comme il y en a tant et pourtant !
On s’y plonge avec délice pour ne plus s’en arracher.
Emporté, emballé, séduit.
Et terriblement déçu une fois le roman refermé, d’abandonner des personnages auxquels on s’était attaché. Des femmes, des hommes et des enfants qui nous étaient devenus si familiers, le temps d’une lecture. Membres fantômes de notre famille intérieure.
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L’éditeur présente Pieux mensonges ainsi :
Qu’est-ce qu’une tragédie ?
C’est une histoire de famille qui tourne mal.
En 400 pages étourdissantes, Maile Meloy raconte la saga des Santerre, une famille américaine pas comme les autres. Et c’est un demi-siècle d’histoire qui défile sous nos yeux en accéléré.
De Pearl Harbor à aujourd’hui, ce roman mené tambour battant redonne ses lettres de noblesse au mélodrame : coups de théâtre, coïncidences, révélations, tout s’enchaîne dans ce récit où la vérité finit par triompher du mensonge.
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Je le concède, une fois que l’on a dit cela, on n’a rien dit du tout. Une histoire de famille sur plusieurs générations, cela n’a rien de nouveau.
Mais il y a dans cette fiction une force hallucinante. Une puissance évidente.
Quelque chose de latent mais d'inébranlable. Philip Roth a, je crois, trouvé les mots pour la décrire en parlant de « précision tranquille » et d’assurance indéniable.
Je suis, pour ma part, convaincue que cela a à voir avec le rythme effréné de sa narration, la construction extrêmement soignée de son intrigue, et la concision parfaite de ses phrases.
Le tout pour un récit d’une redoutable efficacité.
« Clarissa ne voulait pas vivre un siècle. A trente ans passés, elle se sentait épuisée et malheureuse, l’idée de vivre encore soixante-dix ans n’était pas tenable. Couchée dans la luxueuse chambre d’ami de Margot, ses vêtements sales empilés dans un coin, elle pensa – et ce n’était pas la première fois – qu’elle aimerait se fondre dans la terre, devenir l’engrais d’un jardin, quelque part. Mais on ne se transforme pas en engrais quand on a un enfant. »
Alors je vous promets que si l’on aime l’Histoire et les histoires,
les cruelles vérités et les subtils mensonges,
les morceaux de bravoure et les petites lâchetés,
les non-dits avoués du bout des lèvres et ceux qui rongent,
les jalousies à en crever,
on est plus que ravi d’avoir, une fois encore,
suivi le conseil de l'une des plus grandes Plumes que les Etats-Unis aient jamais portée.
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